Dominique Boullier – La posture queer est une nécessité, un relativisme et une impasse politique


Dominique Boullier / dimanche 11 février 2007

 

Le queer est une nécessité.

 

Les travaux des auteur(e)s queer et l’article d’Éric Macé renouvellent de façon utile la question du féminisme. La critique du patriarcat par le féminisme égalitariste classique a conduit à réaffirmer une notion de genre qui peut enfermer dans des rôles, des asymétries et qui est ellemêm e construite. Lorsque Beauvoir utilise le « genre », c’est d’une façon critique contre les naturalismes du « sexe ». Sa critique du genre comme construction sociale doit aider à décoller des identités assignées pour ouvrir des espaces de choix. Or, très vite, théoriquement et politiquement, on l’exploite pour faire du néo-féminisme ou revenir à une forme de naturalisation du genre. Il est donc important de reprendre sans cesse ce travail pour indiquer qu’il doit y avoir débat, que les inégalités se reforment toujours, en se servant du « genre » comme elles ont pu utiliser le « sexe ». C’est en cela que le constructivisme radical du queer est important car il relance l’incertitude, il empêche de fonder les catégories de sexe ou de genre sur de supposées natures scientifiquement justifiées. Lorsque l’on suit avec M.-H. Bourcier les débats internes de ce mouvement, on se rend compte que cette posture antinaturalisation n’a pas de fin. Les débats font rage entre ceux qui considèrent que certaines composantes du mouvement queer dérivent elles-mêmes vers des définitions naturelles : par exemple daddies, queens, s/he, trans, transman, tranny, ftm, mtf, ne cessent de se différencier mais aussi de critiquer les autres pour leur enfermement dans des statuts naturalisés. On trouve toujours plus critique que soi et plus antinaturalisation que soi (…).